Merci pour le voyage Emmanuel Carrère
 Toi qui comme d’hab écris avec ta chair
 Je viens de lire Yoga, ton sixième récit
 Où tu explores ton tragique comme jamais avant lui
Tu t’y passes au scalpel comme le fait aucun autre
 Dans tout ce que tu traverses, tes démons, ton égo
 Et c’est ta force je trouve d’oser braver ton monstre
 Ce que ne fera jamais ton confrère Sylvain Tesson
Emmanuel, toi qui es dans l’antagonisme bipolaire
 De celui qui ne s’aime pas et voudrait qu’on l’aime
 Je me sens en empathie avec toi et le noyau de ton être
 Que tu exposes là mental jusqu’aux confins du grotesque
Dans ce que tu écris je te vois grimper à mains nues
 Je ne sais quelle falaise pour je ne sais quel revenu
 Enfin je dis ça, c’est pour la forme, c’est rhétorique
 A vrai dire je crois bien connaître cet ogre qui te guide
Aimez-moi
 Mes mémoires
 Aimez-moi
*
Merci donc pour ce Yoga Emmanuel Carrère
 Toi qui es ce forçat comme accroc à sa carrière
 Ce crotale qui médite sur sa merde, cette Sisyphe
 Qui pousse sans cesse sa pierre de peur d’être vide
Tu me touches car si tu ne vois pas la beauté de ces livres
 Qu’on dit spirituels, c’est que toi tu cherches ta mouïse
 Or eux ne cherchent nullement à faire œuvre littéraire
 Ils en ont fini avec ces histoires qui nous pompent l’air
Mais toi Emmanuel tu n’en as pas du tout fini avec tout ça
 Laboureur, laborieux, tu retournes sans cesse avec fracas
 Pour avoir l’illusion d’être un père alors que tu es un fils
 Là où le lieu et la fissure de ton mal être, et je compatis
Au lieu de chanter, poète, ce qui serait un moindre mal
 La vie sans profondeurs autres que sa magie imaginale
 Tu te mines, éconduis, à faire le procès de ton égo
 Comme un Philippe K. Dick de Canigou et de caniveau
Aimez-moi
 Mes mémoires
 Aimez-moi
*
Merci donc pour ce passage Emmanuel Carrère
 Toi qui y vas au forceps pour essayer de renaître
 T’exposant aux montagnes russes, au rise and fall
 Comme si tu étais jeune et encore barge des pôles
Alors que tu as plus de soixante ans maintenant
 Et que jouer les docteur Frankenstein va un temps
 Et qu’il y a un temps pour tout, engager des grands travaux
 Et à un moment donné arrêter de chercher, le grand saut
Mais tu as survécu, tu as survécu à la dépression et la folie
 Tu as survécu aux électrochocs et à l’hardcore psychiatrie
 Et depuis tu dis même t’être enfin mis à lire de la poésie
 A ses expirations qui jusque-là ne t’avaient pas conquis
Alors je garde foi en toi qui ressemble de plus en plus
 A Maître Yoda, faite qu’ainsi chemine en toi la Muse
 Se desserre l’articulation culturiste de l’autofiction
 Et vienne celle de la musique, pure célébration
Aimez-moi
 Mes mémoires
 Aimez-moi
(08 09 2021)

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